Je m'incruste dans la discussion entre féminisme pro-sexe et féminisme à l'opposé. J'ai lu récemment deux livres de féminisme radical, Les femmes de droite de Andrea Dworkin, qui est clairement contre (contre la prostitution, le porno, etc) dans les Sex Wars qui ont opposés les féministes dans les années 70-80 aux USA et Peau de Dorothy Allison qui est une féministe radicale et pro-sexe.
Je crois que je n'avais jamais lu de féminisme radical pro-sexe avant et ça me corresponds tout à fait en fait. Dorothy Allison y raconte le féminisme, le sexe, le lesbiannisme, les rapports de classe et la violence, l'inceste, le BDSM. J'ai vraiment adoré cet ouvrage parce que je me suis pas mal identifiée, sur tout ce qui touche à la classe (l'auteure vient d'un milieu white trash je dirais et ça ressemble à ce que moi je connais, les violences de classe) et aussi sur les violences sexuelles qu'elle a subi et que j'ai subi aussi. Elle parle de son rapport au sexe et de son gout pour les sexualités extrêmes. Et de sa culpabilité aussi par rapport à ça. Et en même temps elle n'invalide pas les thèses contre tout ce qui touche au porno, à la prostitution, elle reste une féministe radicale et n'est pas naïve sur les bénéfice qu'en tire les hommes.
J'ai beau être pro-sexe j'ai été entièrement d'accord avec Dworkin quand elle parle de la libération sexuelle, de comment les femmes de gauche se sont fait enfler par les hommes de gauche qui ont soutenu le droit à l'avortement et la liberté sexuelle... juste pour en tirer des bénéfice. J'aime beaucoup tous les avantages que m'a donné la liberté sexuelle et j'en tire beaucoup de bénéfice (j'adore le sexe, je sais que je plais, etc) et en même temps je ne suis pas naïve de tout ça.
Je sais que la révolution sexuelle s'est faite au bénéfice des autres. J'ai vécu des violences, j'en revivrai surement et en même temps je n'ai pas envie de me priver de cette liberté là.
Mais je sais aussi que j'ai un peu de recul sur tout ça. Sur les violences que j'ai pu vivre, sur tout ces concepts, sur mes propres envies. Et c'est hyper facile de rester coincé là dedans en fait, d'aimer le sexe et de se faire avoir en quelque sorte, par des mecs qui profite de ça pour en tirer des bénéfices et surtout outrepasser des consentements, appliquer et profiter de leurs pouvoirs, reproduire la domination masculine dans le sexe et en dehors du sexe.
Je pense tout à fait qu'on peut avoir une sexualité extrême, ou tarifée, ou autre et être actrice mais surtout auteure de tout ça, être celle qui écrit ses pratiques, ses envies, etc,. Être celle qui est active et gérer tout ça. Mais on vit dans une société où c'est très compliqué, parce que le monde et les hommes ne sont pas forcement comme nous et n’acceptent pas cette position active des femmes dans leurs sexualités. Tant mieux si elles le sont dans le sexe et ils ne faudrait quand même pas que ça soit elles qui décident et tirent les ficelles.
Bon je me suis surement un peu perdue dans mon raisonnement mais je pense que vous avez saisi l'idée, je pense que j'en avait déjà parlé ici. Je n'aime pas trop ce débat polarisé entre pro-sexe et anti. Je pense qu'on peut toutes trouver notre place, et qu'on la trouvera sans les hommes, qui n'ont pas à nous dire ce qui est mieux pour nous, que ça soit la révolution sexuelle et le porno ou le lesbianisme politique.
Ah et sinon perso je fuis comme la peste les mecs à la Usul qui intellectualise tout ça et mettent un vernis féministes sur leurs pratiques. Je préfère les petits mecs simples qui même si parfois ils peuvent avoir des comportements problématiques peuvent un peu changer, comprendre, et ont souvent plus une volonté de s'amuser (s'amuser parfois dans la domination mais en s'amusant ensemble) que de dominer, domination dépassant souvent le simple cadre du sexe.
Bon après et là je rentre dans des considérations plus pragmatique j'ai aussi accepté l'idée que je vivrai de nouveau probablement des violences sexuelles, que ça soit dans le cadre libertin ou pas du tout (la semaine dernière je me suis faite suivre sur 2km, ça m'arrive hyper souvent de me faire attraper dans la rue, toucher, etc j'ai vraiment pas de chance à ce niveau là). Et ça m'a pris du temps, et j'ai probablement mis 5 ans à panser mon premier viol, contre quelques jours pour les derniers abus vécus, mais j’accepte cette idée là, qu'on ne vit pas dans un monde accueillant pour nous les femmes, que j'y ait déjà été et que j'y serais confronté, et que deal with it. C'est très personnel comme cheminement donc je demande à personne de le suivre ni rien, mais sa contribue probablement à mes réflexions sur le sujet.